Ça se passe chez Christian Faure, Meilleur Ouvrier de France, dans une belle bâtisse restaurée du vieux Montréal. Ce samedi matin neigeux, une odeur beurrée de croissants chauds et de pains au chocolat dorés m’accueille. Je longe la vitrine déjà remplie de belles pâtisseries, non de beaux gâteaux mais à ce moment je ne le savais pas encore pour rejoindre le salon de thé. La dominante du blanc et des gris, la transparence du mobilier, le mur de grosses pierres et quelques notes acidulées donne à cet espace lumière et clarté. Une table d’habitués savoure un petit déjeuner dans l’attente de l'atelier.
Souriant, veste de chef blanche, le col orné du prestigieux ruban bleu, blanc rouge, il nous accueille pour six heures sur l’art du baba. Il commence par l’histoire de ce « pain perdu » de roi transformé en gâteau par Nicolas Stohrer, pâtissier de ce souverain polonais en exil devenu « simple » duc de Lorraine. Épris des contes des Mille et une nuit, il lui donne le nom d’Ali Baba mais un conflit eu raison d’Ali. Et, le voilà qui enchaine sur la naissance du croissant, prend la route de Damas et nous parle du nougat, de la bergamote ou des fruits confits. Le plus naturellement, il raconte, explique et répond aux questions. En écoutant ces histoires, le rustique baba prend des saveurs féériques… Puis, il met les premiers ingrédients dans le bol, petit à petit une pâte se forme à la texture brillante et élastique. Il n’hésite pas à mettre la main à la pâte, la presser entre ses doigts pour en faire une boule joufflue qui va remplir des moules bouchon ou cannelés. Patience, il faut leur laisser le temps de lever.
Et puis, ça continue avec l’alchimie d’un sirop réussi qui se mesure en degrés Baumé. Et Celcius ? On veut en savoir plus et comprendre… Il répond aux questions généreux et en toute simplicité en zestant orange, citron ou prélevant les grains de vanille d’une grosse gousse charnue de Madagascar. La pâte a levé, il est temps d’enfourner. Pendant ce temps, il reprend la main et nous voilà à suivre la préparation de la crème Chibouste. Dorés, ils les plongent dans le sirop et continue à expliquer. Les babas ont doublé de volumes, saturés, ils ressortent tous gonflés…mais pas nous. Et, puis ils les soulent d’une lampée de rhum. L’assistance ne l’est pas. Il dresse la crème, 11h00, on passe à l’étage supérieur. C’est à nous de jouer. Dans ce grand espace tout équipé, chacun choisit son plan de travail. Je m’éloigne de la fenêtre, il fait froid! Chacun fait sa mise en place, recette en main. Farine, levure fraiche, sucre, beurre et œuf, robot, casseroles, fouet ou balance,... J’ai l’impression d’être dans une de ces émissions de télé si-à-la-mode !
Pas de compétition ici, l’ambiance est bon enfant et appliquée. Notre maitre de cérémonie sort du four une tarte feuilletée aux pommes de terre qu’il coupe, l’accompagne d’une sauce aux truffes et de salade verte. Le déjeuner est servi. Debout pour cette pause rapide , le groupe, des habitués pour beaucoup, retrouvent leur plan de travail et c’est à nous de jouer toujours avec les conseils attentionnés de Christian Faure.
En fin d'après midi, je repartirai, ravie, avec mes six gros babas bouchon réussis et ma crème chibouste vanille car ce soir, c’est moi qui apporte le dessert…
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