Un éléphanteau gris sur un tout petit balcon en zinc de Paris, ça ressemble à un poisson d’avril …. Aperçu par la fenêtre du bus 29, un vrai dimanche de mai, j’ai penché la tête et frôlé le torticolis. La magie des rencontres n’a pas de prix… Il a occupé mes pensées pendant tout le trajet et bien des jours après. Je me suis jurée de revenir. Quand mon téléphone a sonné, je venais juste de le mettre dans ma boite… à photo ! Après des semaines, il était toujours à la fenêtre, sage, attendant que quelqu’un lui ouvre. Début d’une histoire irracontable…
Elle a éclaté de rire, à l’autre bout du fil, et demandé si j’avais ingurgité des substances illicites….Oui, une double dose de rêverie et il était encore tôt dans ce samedi pour m’arrêter. Rue Elzévir, à la pâtisserie Meert, je n’ai goûté que le magnifique (é)clair-obscur de la boutique. Plaisir, désir, ligne… quel dilemme ! Heureusement, à quelques pas, le musée Cognacq-Jay, offre une exposition Thé, café ou chocolat ? Dans l’austère cours intérieure, les bancs de bois, baigné de soleil, se remettent des pluies de l’hiver alors que les pimpantes chaises bleues, à peine sortie, les narguent sur la terrasse du café éphémère. Recroquevillée sur sa chaise, la tête courbée à l’impressionnante chevelure blanche, concentrée, la dame du pays des Lilliputiens écrit. Le sac en bandoulière, un imper pas-de- saison, un magazine bien serré dans la main, elle, aussi, l’a vu entrer et lui a souri ‘’la chaise est libre’’. L’homme à l’allure d’un hérisson, sans hésitation, a rejoint le banc juste derrière elle. Elle s’est replongée dans ses écrits. Ils étaient, pourtant, si bien assortis.
"L'Homme qui parlait à son Enfance"
Lézard réchauffé, dans le dédale des rues, je retrouve mon teint de Perle, devient vieille à Temple, remonte le Perche à pied, croise Saintonge que je croyais au Meurice. Dans la cathédrale Sainte Croix, je reste en tête à tête avec Thérèse. Le concert de piano commence. Impossible de sortir, le grand porche a été verrouillé. La Sainte m’aurait-elle punie pour ce stupide jeu de mot qui me fait toujours rire. En retrouvant le soleil de Charlot, l’hôtel de Retz affiche "6 mois de rêverie"une aubaine qui ne se refuse pas.
J’entre dans l’univers de Pascal Colrat. L’élégante sobriété du lieu, plafond haut et luminosité n’ajoute qu’à la beauté des dessins et à la phrase qui les illustre. La nuit, Ésope et La Fontaine échangent, sûrement, dans le petit jardin, autours de cette onirique table de ping-pong sur les héros de ce parent du XXème siècle. Touchant poétique, ce regard sur l’Homme… On y lit les doutes, les peurs, le questionnement, le rapport à la vie. Sensible, drôle, pas moraliste mais un regard attentif sur les dilemmes existentiels avec légèreté et pudeur… Beau, tendre, ça vient du fond du cœur et vous touche l’âme….
J'aurai aimé repartir avec un livre de ces dessins mais il n’existe pas. Dommage, je voulais tous les adopter comme "le rat qui s'était fait friser les moustaches pour qu'on l'aime" ou "Le Chien déterminé à traverser la terre" et prolonger l' histoire. L’exposition joue les prolongations jusqu'à la mi juin, à voir absolument pour s'assurer "6 mois de rêverie" et plus si affinité.
J’ai quitté à regret le lieu après une pause à la terrasse du petit café. Puis, longé la Bretagne pour rejoindre Nazareth où je ferai une jolie rencontre au Kilikio mais là, c’est encore une autre histoire….
Les commentaires récents