Le Nez dans les Casseroles

BOULANGERIE CROUSTILLANTE CHIC, "O TAKIS"...

Ses yeux pétillent quand il me dit qu’il n’y a pas meilleur pain que celui qu’il achète dans le quartier de Koukaki. Ce n’est pas la porte à côté avec Paléo Faliro ! C'est un peu comme habiter au 6ème sans ascenceur et avoir oublier le sel. Moi, j'y pense à deux fois avant d'y aller. A deux pas, nous avons l'impeccable Pétromilo de la rue Sirinon,  le sublime Karveli de campagne de Terpsixoris, le Galiko complet de Iridos ou cet délicieux pain jÔne au maïs à l'angle de Naïadon & Zaïmis. Aucun n'a grâce à ses yeux. C'est là-bas que tout est meilleur ! Bon, je suis curieuse de découvrir The-fournos-of-Koukaki mais pas désespérée. Athènes compte, dans chaque quartier, d'excellentes boulangeries qui pétrissent, boulent, façonnent et cuisent encore sur place. Et il n'est pas rare, quand je marche dans les rues du quartier, que l'odeur de pain, de brioche, de biscuit à la cannelle à peine sortis des fours ou qu'un sirop de sucre versé sur des glyka Tapsiou(1) encore chauds me chatouillent les narines, me fassent déglutir comme un chien de Pavlof. Et quand, en plus, ces parfums se confondent avec le jasmin ou la fleurs d'oranger des rues, c'est divin absolument divin !

Tiens, me voilà beaucoup plus vite que prévu devant Le fournos « O Takis » ! Mon guide a de la suite dans les idées. 

Une devanture étroite aux tons chauds et soignés, une enseigne traditionnelle de bois peinte, une couronne de lavande, la barre pour attacher les animaux de compagnie, je me dis que je pourrai être ailleurs tout en étant à quelques pas du musée de l'Acropole, dans Koukaki alias le Petit Paris d'Athènes, au siècle dernier.

 A cette heure, la boulangerie déborde de monde. Il y a déjà eu une razzia dans les paniers de bois foncé. J'aperçois de filiformes baguettes qui me plaisent. Dans la vitrine, des petits feuilletés au jambon, tout dorés, débordent de fromage et me font de l'oeil avec de beaux sandwichs tout frais préparés. Une jeune vendeuse renseigne tranquillement une cliente qui cherche un encas salé. Ici, on ne bouscule pas, on ne parle pas fort et on ne gruge pas dans la queue... Sur le comptoir des gâteaux aux pommes et d'autres ronds et gros avec des couches de crème un peu british et une farandole de pains longs, carrés, tranchés, blancs, noirs, graines de sésame ou de lin. Avec ses 30 variétés de pain, il y en a pour tous les goûts.

Je choisis à l'aveugle un pain noir tranché qui ressemble au Vollkornbrot germanique, bonne pioche, et repars aussi avec une de ces longues baguettes plates, à la croute généreuse et avec ce juste qu’il faut de mie… pour préparer des tartines en mode salade grecque pour le déjeuner.

 

Je comprends pourquoi beaucoup d'Athéniens courent dans cette institution classée souvent dans le top ten des boulangeries de la capitale.

Et moi est ce que j'y retournerai ?

Si je suis dans le quartier, oui et parce que la baguette "Καμπαγιού" farine blanche ou complète est la meilleure que j'ai goutée sur Athènes jusqu'à présent, genre pourquoi rentrer à Paris ! Et puis je ne suis pas arrivée assez tôt pour tester les gâteaux. 

Et je conseille de passer par là lors d'une visite l'Acropole et le Musée afin d'éviter les vendeurs du temple aux tarifs très touristiques. Les sandwichs sont moins chers et sans conteste  de meilleure facture plus un large choix de tartes et de feuilletés. Et à quelques pas de là, vous pourrez rejoindre  la colline de philopapou et la petite buvette pour vous poser et croquer au calme à l'ombre des arbres. Par contre si vous préférez emporter votre glacière, alors là, c'est une autre histoire...

◄☺☺☻☺☺►

Boulangerie O Takis 14 Misaraliotou street, Koukaki. Tél. 2109230052 Horaires: Lundi à vendredi 7:00 – 20:30 Samedi: 7:00 – 16:00, Fermeture le dimanche. 

(1)Glyka tapsiou, catégorie qui prend le nom du moule dans lequel les gateaux sont préparés (tapsi) et regroupe les gâteaux au sirop d'Asie Mineure type baklava, kadaïfi, galaktobouriko,...(2)Very Greek, dessous de plat et sous-verres en plexiglass créés par Katerina Moraïti. En vente à la boutique du Musée Benaki à Kolonaki. Ne les cherchez pas dans cette couleur, elle n'existe pas !

 

L'YPEROKEANIO, EN RÊVANT DANS LES COURSIVES...FIN DU VOYAGE

De retour un peu avant l’ouverture,  je patiente en savourant l’âme du stoa , la fraicheur naturelle,  l’odeur un peu passée de l’endroit. Dans le calme, j’observe sur le grand écran lumineux de l’entrée, l’animation en sourdine de la rue. Une jeune femme pose une chope de bière qui gouttelette et un petit bloc à spirale avec les mezzés du jour. Elle retourne d’un pas léger conter  fleurette au vieil habitué assis à deux pas.

Les flâneurs entrent en quête d’une place et repartiront bredouille. Les chaises resteront au coin empilées. Le "cling" sec de la sonnette  entrecoupe les morceaux rockabilly qui arrivent de la cuisine et rappelle notre serveuse aux commandes.

Pas très convaincue, je me décide pour la salade verte vinaigrette au Tahini (2,50€) et une tyrokauteri au four (3,50€). Je m’attendais à un soupçon de plus-de-choix. Je me suis peut être laissée influencée par les vestes noires des chefs en cuisine. La carte est vraiment simple version mezzès-de-base (saucisse, fava, fromage grillé, hareng fumé, …) mais sans ruiner votre porte-monnaie ce qui ne va pas toujours de pair aux Pays des Hellènes. Et, nous pouvez, très bien, grignoter à deux, les portions s'y prêtent.

Ici, on ne vient pas pour l'originalité des mezzés qui feraient frémir les papilles. Le tahini est peu présent  pour ne pas dire absent dans la vinaigrette et le concept tyrokafteri au four est râté. Bien meilleure froide et crémeuse que dans cette version coagulée et granuleuse. Il parait que la carte change dixit le jeune sous chef rencontré le matin. J'espère que certains  jours soient plus inspirés. 

Dans ce Paradosiako Kafeneion, vous y venez pour l’atmosphère, la petite terrasse cachée sur le toit et le bonheur de voir un stoa de 1932 revivre. Si vous voulez profiter d’Athènes autrement, l'Yperokeanio (υπερωκεάνιο) est un transatlantique de poche pour une escale sympathique dans Perikleous 46 (métro Syntagma).

L'YPEROKEANO, UN PAQUEBOT DE POCHE...PREMIÈRE ESCALE

Pour apprécier Athènes,  il faut se départir de tout préjugé, ne pas comparer,  accepter  ses laideurs pour en apprécier « la substantifique moelle ». L’œil peut être fatigué par un état d’abandon, de laisser aller dans les rues ou sur les façades d’immeubles.  On peut s’agacer des trottoirs étroits, de guingois, souvent  encombrés d’échafaudages dépenaillés qui rétrécissent encore un peu plus  le passage, des  automobilistes garés  en épis, prêt à mordre si vous vous risquez à la moindre réflexion ou qui vous regardent de travers au cas où vous érafliez la peinture en vous faufilant dans le maigre espace qu’il y a entre le mur et son véhicule. En passant à l’arrière, il faudra gérer les deux -roues zigzagants entre les voitures, peu attentifs aux piétons. Ils vous évitent en  lâchant des jurons et vous montrent  le trottoir. Autre situation amusante,  le moment où  la voiture-du- trottoir force le passage pour reprendre ses droits sur la route et oblige un deux roues à freiner. En général, commence un échange vif visière levée et glace baissée où chacun hurle qu’il a raison. Le ton monte, les voitures bloquées klaxonnent. On pense qu’ils vont en venir aux mains. Je souris devant cette scène dont je connais déjà la fin. Dans le centre, qu’on se le dise, on est toujours pressé, agacé, et un peu rude. On bouscule  facile et sans excuse. Ici, on court parce que courir est un état. C’est peut être normal au Pays du Marathon !

Je m’empresse  de rejoindre l’église Aghia Irinis en longeant la rue Perikleous.  A cette heure matinale, Il fait déjà chaud, très chaud, trop chaud et trop tôt pour beaucoup d’Athéniens déjà  épuisés  par  les temps qui courent. La rue est en ébullition. Les marchands de tissus, de bijoux et de perles ont ouvert leur porte.  Bon signe, des ouvriers  rénovent de vieux magasins depuis longtemps fermés. Trop tard ! La vieille enseigne « Joli » a disparu, tant pis pour moi !  

La lumière au fond du stoa du 46 de la rue m’arrêtent.  Des chaises de kafénion grises et jaunes, un énorme poisson dessiné  à l’entrée, je cherche un indice, un nom…Rien. Me voilà dans la fraicheur de ce passage vide. La plupart des magasins ont définitivement baissé le rideau. Je me rapproche de ce puits de lumière de métal et de verre.  A droite,  je trouve enfin ce que je cherche.  J’aperçois  un jeune homme en veste noire de chef. Il  fait la mise en place dans la minuscule cuisine de son navire nommé l’Yperokeano,  un transatlantique de poche. Je jette un œil sur le bloc à spirales qui sert de menu, Voilà que j’ai trouvé mon escale pour déjeuner! Pas le temps de m’attarder. De toute façon, les cuisines n’ouvrent qu’à partir de 13h00.

Je repars pour une visite gratuite de la rue Eolou,  commentée par une guide professionnelle . Ici, c’était organisé par la Mairie d’Athènes mais de plus en plus d’activités gratuites sont proposées. une nouvelle façon de vivre dans la capitale et de l’apprécier. Demandez le programme ! Il est 13h00, je retrouve la fraicheur du passage et passe commande, mais ça c'est dans la prochaine escale... 

 

LA "PETITE FLEUR"...DU CHOCOLAT CHAUD A ATHÈNES...

Siroter un chocolat chaud et se croire pour encore quelques heures en hiver... Je profite de ce rare matin pluvieux du mois mai pour faire une pause, les pieds mouillés, sur la terrasse acidulée du café "Petite Fleur". Ce mouchoir de poche élégant de Kolonaki aux airs très parisiens sert d'indécents chocolats épais et onctueux sur fond d’airs jazzy et romantiques. Si l’aiguille vient à coller dans les sillons du vinyl,  le jeune homme appliqué  aux allures d’étudiant en droit peut lâcher, pour quelques instants,  la queue du briki(1) dans lequel fondent les pastilles de chocolat mélangées au lait frais. 

A la façon d’un café grec, sur une flamme de Butagaz, sans se départir de son sérieux,  il touille dans un rituel calme et bien rodé la potion chocolatée aux pépites de lait ou à 70% de cacao,  ajoute discrètement  cannelle, poivre ou zeste d’orange suivant la commande.  Puis, le breuvage est versé lentement dans d’énormes tasses aux airs de soupières et signé d'une petite fleur... Ça a du bon la pluie, n'est ce pas ?

 ◄☺☺☻☺☺►

Si vous ne vous sentez pas cap à avaler presque un quart de litre de chocolat(2), la maison offre une belle gamme de thé(3) servie dans de jolies tasses de porcelaines.

Pour résumer, Atmosphère cosy, Kolonaki sans tatouage, service tranquille, courtois et souriant, excellent chocolat. Les sandwichs sont appétissant à la carte, destructurés dans l'assiette et au final sans intérêt en bouche. Côté pâtisserie, classique sans surprise avec cheese cake, pasta flora, carrot cakes... Grosse part généreuse dans l'assiette mais n'ayant pas gouté et bien je m'abstiendrai de tout commentaire... 

Et puisque les jours de pluie vont devenir rares. La terrasse sous pilotis offrent une belle fraicheur pour les journées ensoleillées et chaudes de l'été qui arrive.

(1) Petite casserole qui sert à préparer le café grec (2) à partir de 3,80€ - (3) à partir de 3,50€

PÉCHÉS DE "FLAOUNESSE"...

Athènes vide, quelle aubaine! Me voilà à arpenter les rues de Kolonaki pour rejoindre Exarcheia. Sur des terrasses de café aux  rideaux baissés, je joue à la cliente  qui ne trouve pas où s'assoir, un véritable luxe. Dans le quartier des z’anarchistes Hellènes, même pas peur, je rase des murs tagués, gribouillés, graffités, juste histoire de profiter de  l’ombre d’une matinée déjà suffocante.  

Je longe le jardin communautaire, une bulle de verdure au milieu de l’agglomérat d’immeubles ne voulant pas troubler les occupants des bancs dans leur réveil matinal. Dans la voie piétonne vide, il me faudrait au moins la journée pour passer en revue les façades bigarrées de fresques et lire les slogans contestataires. Enfin, j'arrive dans la rue Benaki en me demandant si la dame aux cheveux blancs qui m'a gentiment indiquée une boulangerie appartenait à une bande organisée. Ne suis je pas  au coeur d'un quartier, dixit les médias et même le département d'État américain, noyant dans le complot et l'agitation? Tout journaliste ou correspondant de passage à Athènes a vu, rencontré et même interviewé des purs et durs de la contestation... Ma seule certitude, ça ne devait pas être un vendredi saint ! En sonnant à la porte du sixième étage,   je souris en entendant  mon amie Patricia s'exclamer avec sa gouaille de parisienne-de-la-rue-Lepic "Pourquoi as tu apporté des petits pains, j’ai des "flaounes " . Je ne sais absolument pas ce qui se cache derrière ces étranges et rigolotes Flaounesse.  Elle s’empresse de m’expliquer que c’est une spécialité du Pays des Seftaliés qui se prépare le vendredi de la semaine sainte. Ici, je précise nous sommes dans un territoire chypriote qui parle aussi le Swahili...

 

Sur la terrasse plantée, avec vue sur le Lycabette et l’Acropole, je croque, alors que je ne devrai pas, dans un chausson tiède et moelleux aux quatre fromages (Kéfalotiri, Graviéra, Haloumi et Galotyri), qui ressemble à un pain aux raisins dodu.  Miam, ça a tellement le gout du péché divin que je m'empresse de demander la recette !  

Après les fêtes,  je vais demander à être réinvitée pour un café…même si y a pas de lait, que les tasses sont dépareillées, presque ébréchées, que la terrasse n’est pas balayée car ce cahier j’aimerai bien continuer à le feuilleter mais ça, c’est une autre histoire !

 

 

 

SABOR, UNE PAUSE CAFÉ DE L'AVANT A ATHÈNES...

Je n’ai pas besoin de me pousser beaucoup pour  aller à Athènes. Ni les manifestations, ni les grèves ne m’empêcheront d’aimer le centre et d’y retourner et en plus à cette période de l'Avant. Comme bien souvent, de Syntagma, je me dirige à pied vers la rue Athinas en prenant souvent les chemins buissonniers. Le nez en l’air, je tourne deci delà, traverse, m'enfonce dans les ruelles ou coupe par les stoas pour rejoindre, à un moment donné, ma destination finale. Dans un de mes détours, je passe devant une ruelle piétonne froide et sans charme. Pourtant, le rose vif de couvertures bien pliées sur des chaises alvéolées tendance m'accroche l'oeil.

Je prends un peu de recul pour mieux découvrir ce lieu inconnu aux vitrines étoilées de Noël installé au rez de chaussée d'un magnifique bâtiment néo classique.  Ses beaux balcons verdoyants indiquent qu'il est habité. Quelle rêve de vivre là ! A l’entrée, un vélo avec pot de basilic aux tiges disproportionnées d'une saison qui tire à sa fin,  je lis « self service » sur une des grosses épingles à linge en bois disposée sur les tables de la terrasse. Du haut des trois marches décorées de jolis paquets cadeaux, j'aperçois un adorable petit sapin en pain de mie enneigée d'un glaçage de sucre, il ne m’en faut pas plus pour me donner envi de pousser la porte de ce café-bodega nommé Sabor. Un mouchoir de poche chaleureux et chic! Sur le comptoir, des assiettes d’amuse-bouches plus cocktail que tapas à mon goût mais fort sympathiques. Je jette un œil sur les cupcakes chocolat, les grosses plaques de chocolat aux fruits secs que je soupçonne maison et finalement craquer pour un mini sandwich baguette si joliment enveloppé de rose et d'argent (1,50€). Le service est souriant, efficace et professionnel… On me dit très gentiment de m’asseoir en attendant de m’apporter un généreux café latte (2,50€)… Pour une pause collation, ne pas hésiter à s'y arrêter mais il mérite sûrement de s’y inviter à un autre moment de la journée pour connaitre son côté bodega. Une bonne raison de plus de retourner à Athènes mais en avais je vraiment besoin ? 

◄☺☺☻☺☺►

SABOR Café & Bodega Perikleous & Kornarou, 105 63 Athènes - Tel. 210 33 12 330 Métro Syntagma

"ANTHOS", UNE CANTINE ATHÉNIENNE…

Athènes n’est pas le champ de bataille quotidien qui me valent les coups de fil d’une Môman affolée (et je la comprends) après le 20h00 parisien. Si on se fie aux images, on peut vite penser que c'est la révolution ! Et, comme elle ne croit pas toujours ce que je lui dit et aussi les médias, elle a sauté dans l’avion pour voir ! 

Ses copines, appellent et "smessent", « T’es bien arrivée… l’avion a pu attérir ».  Je crains qu’elles lui ai collée un casque et un treillis dans ses bagages. Vite, on est monté en bus au centre pour flaner dans l' Athènes que j'aime,...toujours mis à mal, si peu révolté et plutôt résigné. 

Il est 15h00, toujours pas d'émeutes en vue et ça sonne faim... Ma mÔman, elle aime les années 60, Irini Papa, le café grec, la musique de Zorba et l'univers de Théo Angelopoulos. Il lui faut de l'authentique et surtout pas du touristique sinon elle plisse le nez d'une telle manière que je sais que c'est pas ça. Alors, nous voilà, chez Anthos, une cantine d’hiver en face du très sympa Bartesera. 

Quatre tables occupées par des hommes seuls, le regard vers la fenêtre ou  feuilletant un journal.  L’accueil est réservé. Pas de grands sourires, mais on vous rapproche rapidement deux tables pour être plus confortable. Trois verres, juste passés sous l’eau, arrivent plein et ruisselants. Sur le comptoir, un grand plat de horta cuites, derrière la vitrine, les grands « tapsi » gardent au chaud, espadon au four, queues de rascasses pour un kakavia,  bœuf kokinisto, keftedakia à la sauce tomate, poulet rôtis et pomme de terre au four. Le cuisinier et propriétaire soulève les couvercles des grandes casseroles où mijotent des pois chiches et des lentilles. Le temps de passer la commande, les mangeurs-solitaires sont déjà repartis vaquer à leurs occupations.  Dans ce lieu, tout est sobre à l'image des carafes d’eau servies ou de la carte dorée "Interdiction de fumer"  glissée sur les tables. Ici, on applique la loi, un miracle.  Les portions sont copieuses. L’assiette de citron pour assaisonner poisson et xorta déborde. Le couple continue de s’affairer sans un mot. Le silence qui règne dans la salle, est presque monacale.

L’entrée d’un habitué laisse s’infiltrer un peu du brouhaha  de la rue, le temps de passer à la caisse tenue par Madame et récupérer son déjeuner-paketo à emporter. Dans cette cantine, entre Syntagma et le vieux parlement, on se restaure d'une cuisine simple, du jour et bon marché. Un peu comme si on passait déjeuner chez un vieil oncle, un peu bourru, qui garde au chaud des plats maison bien d’ici. Mais pour combien de temps encore ? 

Quant à ma Môman, elle est rentrée saine et sauve de son expéditon. Elle a rassuré ses copines qui gossipent et se demandent, encore, si vraiment elle était à Athènes ! 

◄☺☺☻☺☺►

Το Άνθος (la fleur): 10, Kolokotroni street à Athènes (Plan). Ouvert les jours de semaine à partir de midi. Fermé le soir et les weekends. 

LE MILLEFEUILLE D'ALMA

J’ai le « Toc »  du millefeuille. Ça se manifeste, lors d’un premier passage, dans une pâtisserie ou un restaurant, même si il y a des merveilles à côté, c’est lui que je goûte d’abord ! Manger un millefeuille relève trop souvent d’une mission impossible.  Le mouvement de la cuillère qui  traverse les « plaques rectangles feuilleté » provoque, trop souvent, un séisme.  Les deux niveaux se renversent de droite ou de gauche suivant la pression et la crème déborde de tous les côtés. Votre assiette ressemble à un champ de bataille et vous ne savez plus par quel bout le prendre ! Là, il faut mettre la main à la pâte et  retirer, délicatement, la partie supérieure couverte de sucre glace, en s’en collant partout et manger un gâteau très déstructuré… Deuxième cas de figure, la cuillère passe tout reste en place sauf que vous vous retrouvez à macher une pâte toute  molle à la crème pâtissière, et là, c’est comme manger un chewing gum après un croissant ! Pour conclure, un millefeuille croquant, c’est étonnamment rare à trouver. Et, voilà comment j’ai franchi la porte de la Pâtisserie Alma, à deux pas de chez moi.

A vrai dire, je suis passée pendant des années devant cette vitrine surannée sans m’y arrêter jusqu’au jour où une vieille connaissance du quartier me parle de son excellent millefeuille et d'une fournée matinale de tiropites (feuilletés au fromage) à ne pas rater. En bonne « toquée », j’ai rapidement franchi la porte. Là, sous les traits d’un pâtissier réservé et souriant, j’ai retrouvé l’amabilité, la politesse d’autrefois celle-là même qui a été remplacée, de nos jours,  par un accueil rude et désinvolte au  « tu » obligatoire. Dans le pléthore de pâtisseries de la capitale au décor "M’as tu vu" ou prétentieux, ici, c’est un voyage dans le passé !  Rien a du changer depuis la date peinte sur la vitrine : 1972. Le temps s’y est arrêté. Je m’attarde sur les vitrines de chocolats*, de biscuits, de choux, éclairs ou coques… Fabrication maison, pas de doute. A la caisse, je jette un coup d’œil dans l’atelier désuet et repars avec mes deux parts d’un millefeuille rustique dans une boite sans nom! Je me demande qui vient car je n’y ai jamais croisé personne. Mais les trous sur les plateaux montrent que d’autres sont passés avant moi dans la journée.

Enfin dans mon assiette, je vois la cuillère progresser, s’enfoncer sans catastrophe et m’offrir une bouchée qui croustille, une crème pâtissière sucrée juste comme il faut, un feuilleté tout en légèreté, finesse et croquant. Et, là, je dis: "si j’avais su, je serai rentrée plus tôt". Ce pâtissier tout en discrétion prépare des gâteaux simples, frais et maitrise l’art du feuilleté. Ça mérite de s’y arrêter et de bonne heure pour ses excellentes tyropites... Après 10 heures, y en a plus !  

◄☺☺☻☺☺►

 * Les chocolats ne sont pas fabriqués par Alma mais par l'excellente Maison Visso. Je ne parlerai que de leurs oranges confites au chocolat noir et de leurs Amigdalotas à la pâte d'amande que j'affectionne très, très particulièrement ! 

RESTAURANT MILOS - ATHÈNES

Le porte monnaie des Hellènes se vident et les tables aussi… Alors, pour enrayer la crise, les restaurants athéniens proposent des menus. Il était tant ! Belle déco et nappage ne suffisent pas à avaler la note salée d’une fin de repas très médiocre. Depuis longtemps, je laisse les « m’as-tu-vu » s’enthousiasmer et je préfère les tavernes traditionnelles d’où je rentre satisfaite et pas volée. Mais bon, la française que je suis aime bien, de temps en temps, les beaux endroits des tables nappées.

Ma curiosité de gourmande m’a amènée à diner au restaurant Milos. Après Montréal, New York,... le chef Costas Spiliadis revient en 2004 comme la flamme olympique dans l’emblématique Hôtel Hilton. Après avoir conquis la clientèle Nord-Américaine, Il offre aux Athéniens sa version de la Cuisine Hellène soit simplicité, tradition et produits de terroir. Un pari osé mais réussi.

Une fois passée la surprise d'une salle surdimensionnée, j'ai apprécié l'espace dans les tons gris-blanc, le décor élégant et sobre et les grandes tables rondes qui permettent à une paréa(1) de s'y retrouver à l'aise. Nous avons opté pour le menu 4 plats à 25€(2) qui propose, entre autre, un bar mariné à l’aneth et bergamotte, moules saganaki, saumon grillé accompagné de stamnagkathi(3) de Crète et des minis loukoumades avec glace kamaïki… Les produits sont d’excellentes qualités et cuisinés juste. La cuisine ouverte sur la salle permet d’aller jeter un œil et met en confiance. L’amabilité du personnel, si rare par chez nous, est un vrai plaisir. Ils vous présentent les plats, la carte des vins avec une foule de détails et répondent avec beaucoup de professionnalisme. Même si la grande majorité de la clientèle commande à la carte, pas de complexe en commandant le menu, on s’occupe de vous avec la même prévenance.  Pas besoin de sortir vos diam’s et fourrure pour y aller, le dissimo (4) est casual bien qu’à cette saison vous croiserez quelques manteaux en poil… 

Un grand oui pour le menu.  A la carte, il faut compter plus du double pour 3 plats, je suis plus réservée mais c’est un avis personnel.  A la fin du repas, prenez le temps de monter au dernier étage de l’hôtel, le bar « Galaxy »  offre une vue magnifique sur Athènes et l’Acropole. 

Estatorio Milos – Hilton Athènes - 46 Vassilissis Sofias Avenue - Athens Tél : 30-210-7281000

 « Je n’ai pas digéré » : Une facture de 16€ de parking présentée, à la réservation, comme une prestation gratuite pour les clients du restaurant….Si j’avais su, je me serai garée dehors ou j'aurai pris le bus ! 

 ◄☺☺☻☺☺►

(1)Paréa/Παρέα: Groupe d'amis. (2)Milos reverse 1€ sur chaque menu à une association caritative dont je  n'ai pas retenu le nom mais c'est écrit. (3)Stamnagkathi/Σταμναγκάθι: Chicorée épineuse. (4) Dissimo/Ντύσιμο: Tenue vestimentaire.

 

Chez "ANESTHIS" - ATHÈNES

Un samedi sous le soleil, nous musardons dans le quartier du marché central et de la rue Athinas. A l’heure du déjeuner, nos pas se dirigent, comme par un heureux hasard, vers l’oinomagirio (1)  "Anesthis". A l’angle des rues Theatrou et Sokratous, il se cache au sous sol d’un bâtiment néoclassique abandonné.

Pas d’enseigne, pas de menu affiché, ne cherchez pas, juste une ouverture et quelques marches en marbre gris qui vous guident vers le sous sol. En descendant, une odeur de sardines grillées me chatouillent les narines. La salle est déjà bondée mais j’aperçois la dernière table libre sur la dizaine que compte l’endroit. Il faut être patient ou prêt à partager. D’un signe de tête, un jeune homme nous dit de nous installer. En passant, je regarde dans les assiettes, à priori aujourd’hui, au menu, fassolada(2), pois chiches, sardines grillées, giouvetsi kritharaki(3) et salade mixte (tomate, concombre et romaine). La table est vite redressée, deux feuilles de papier blanc en guise de nappe et un version carré pour les serviettes. Pain, cuillère à soupe, fourchette et un demi kilo de vin blanc arrivent en deux trois mouvements.

Derrière le minuscule comptoir, le propriétaire, cheveux blancs, jolie moustache bien taillée en blouse blanche impeccable, stylo à la poche, s’affaire à préparer les commandes. A peine le temps de boire une gorgée que nos plats sont  là… Les pois chiches fondent en bouche, le pain plonge dans sa sauce, les sardines grillées sont divines. Je câle sur la salade mais pas pour un verre de ce délicieux retsina tout droit sorti des immenses fûts qui habillent les murs…

Toutes les tables tendent leur pichet. Le jeune homme en salle a à peine le temps de rincer les verres couverts de savon qui s’empilent sur le comptoir à ouzo en marbre. Des gens attendent, d’autres se saluent en vieux habitués. Peu pressée de céder la place, j’ai encore envi de savourer l’âme du lieu, de poursuivre la conversation entamée avec nos voisins et surtout de dire au maitre des lieux, "Ne changez rien, c’est tellement joli chez vous". 

 ◄☺☺☻☺☺►

(1)Oinomagirio (Οινομαγειρείο): cuisine simple des plats cuisinés traditionnels servis avec du vin (2)Fassolada (Φασολάδα): soupe de haricots blancs à la tomate. (3)Giouvetsi krissaraki (Γιουβέτσι Κριθαράκι): Daube de boeuf à la sauce tomate avec des petites pâtes krissaraki de forme ovale.